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Envergure : 40-50 mm
La Petite Tortue se caractérise par le dessus des ailes variant du fauve orangé au rouge brique, les antérieures avec trois grandes taches costales quadrangulaires noires et trois taches arrondies de même teinte, plus ou moins développées vers l’angle interne. Aux postérieures, les aires basales et discales sont noires. Les bordures marginales, très tortueuses, sont rehaussées de lunules bleues. Le revers est essentiellement brun fuligineux marbré (ce qui assure à l’espèce un bon camouflage lors de l’hibernation). L’habitus est proche de celui de la Grande Tortue (Nymphalis polychloros), mais cette dernière est beaucoup plus grande, avec les ailes d’un fauve plus jaunâtre et plus terne, et surtout entièrement brun sombre au revers des antérieures. Pour ces deux espèces, René-Antoine Ferchault de Réaumur explique en 1734 que le nom « Tortue » lui vient «de la distribution de ses couleurs, qui imite en quelque sorte celles des taches de l’écaille ».
La Petite Tortue, mésophile et rudérale, affectionne des milieux très variés où pousse l’Ortie dioïque (Urtica dioica) : friches humides, bord des ruisseaux, chemins et lisières forestières, jardins, terrains vagues et anciens dépotoirs. En montagne, les populations se concentrent autour des terrains ouverts, fortement anthropisés : talus, pistes, chalets, bergeries et pâturages. Très floricole, l’adulte fréquente une multitude de plantes nectarifères depuis le Tussilage et les chatons de Saules au début du printemps, jusqu’aux derniers Asters en automne dans les jardins. Grégaires aux stades précoces à l’abri d’un lâche nid de soie, les chenilles deviennent solitaires après leur dernière mue. Très faciles à élever, les individus présentent un développement rapide permettant l’obtention d’imagos cinq à six semaines plus tard. Les adultes hivernent dans des cavités d’arbres, entre les pierres des vieux murs ou dans des anciennes bâtisses. Ils peuvent s’observer dès les premiers beaux jours du printemps.
Les femelles pondent de petits amas d’œufs sur le revers des feuilles d’ortie. Espèce univoltine, elle principalement de fin mai à la mi-juillet, puis d’août à octobre après estivation. À basse altitude, il n’est pas rare d’observer des imagos fraîchement éclos mi-octobre, appartenant probablement à une deuxième génération très partielle. Les adultes hivernants réapparaissent dès la fin février par temps doux.
Les adultes se nourrissent principalement du nectar des fleurs, les chenilles dévorent les plantes hôtes.
Bien que l’espèce ne semble pas activement menacée, les fortes variations pluriannuelles de ses populations posent question. Il semble qu’en plaine, la Petite Tortue souffre du défi cit hydrique estival, ce qui expliquerait au moins en partie ces phénomènes. Sa plante-hôte, l’ortie, reste très commune ; toutefois son élimination est toujours recherchée dans les mesures d’entretien des zones péri-urbaines. Le développement de certaines plantes à caractère envahissant, comme la Renouée du Japon (Reynoutria japonica), compromet localement le maintien des mégaphorbiaies à ortie et fragilise de fait les populations de Petite Tortue, surtout en contexte alluvial.
On ne peut qu’encourager l’abandon de l’usage des herbicides et l’arrêt de la guerre systématique à l’ortie, notamment dans les jardins particuliers où l’espèce peut trouver refuge. Le maintien d’îlots fleuris, y compris dans les jardins, favorise les imagos. La lutte contre les plantes invasives, bien que compliquée là où elles sont déjà bien implantées, est également une mesure conservatoire à préconiser.
Les papillons sont les proies de nombreux insectivores, ils peuvent être consommés par d’autres insectes et des oiseaux par exemple.
Espèce eurasiatique répartie sur l’ensemble du territoire, la Petite Tortue est plus ou moins commune, avec des effectifs très variables selon les années, et une tendance globale à la baisse de ses densités en plaine et dans les régions les plus chaudes, depuis une dizaine d’années. Elle se raréfie cependant dans la moitié nord-ouest de la France, à basse altitude. Même constat dans nos régions, surtout en Bourgogne, où malgré de fortes fluctuations annuelles constatées, la tendance est à la raréfaction dans les stations de plaine, mais avec un regain notoire en 2011 et 2012. L’espèce est plus fréquente à partir de 600 m, avec des populations plus stables dans les Vosges méridionales et le massif du Jura, où elle a colonisé les plus hauts sommets (jusqu’à 1 448 mètres au Crêt au Merle). Elle présente des mœurs et une répartition assez similaires au Paon-du-Jour mais semble plus fréquente à moyenne altitude.
DUTREIX C., 2013, Papillons diurnes et nocturnes de Bourgogne, Ouvrage, L'escargot savant : 368p.
LAFRANCHIS T., 2000, Les papillons de jour de France, Belgique et Luxembourg et leurs chenilles, Ouvrage, Coll. Parthénope, Biotope édit., Mèze (France) : 448p.
LAFRANCHIS T., JUTZELER D., GUILLOSSON J-Y., KAN P.&B., 2015, La Vie des Papillons. Ecologie, Biologie et Comportement des Rhopalocères de France., Ouvrage, Ed Diatheo : 751p.